Edito
LE CADEAU DES LÉGENDES
Il y a dix ans, un sérieux pépin de santé mettait un coup d’arrêt à la carrière flamboyante de Dennis Chambers. À l’époque, sa perte de poids effrayante avait ému l’ensemble de la communauté des batteurs et entraîné une immense vague de soutien sur les réseaux sociaux. L’occasion pour Dennis de mesurer l’impact de son œuvre chez des milliers de musiciens : « J’étais à l’hôpital en Espagne après ma sortie de coma, ma femme m’a donné sa tablette et j’ai vu une liste sans fin d’emails venant de partout dans le monde, ma page Facebook avait explosé. Ça m’a vraiment touché », nous confiait le batteur entièrement requinqué dans les loges du New Morning à Paris en 2017. Car oui, à l’instar de Vinnie, Weckl et Cobham, Dennis Chambers a marqué plusieurs générations de cogneurs. Tantôt extraterrestre funk, tantôt monument du jazz / fusion, ce natif de Baltimore, Maryland, fut l’un des premiers à conjuguer groove, puissance et technique de haut vol derrière les fûts. Et ses disciples se comptent par dizaines de milliers, à commencer par les gospel drummers, Aaron Spears en tête, qui voyait en Dennis une sorte de père spirituel. En septembre dernier, il avait d’ailleurs rendu un hommage vibrant à son héros lors de la soirée du 400e anniversaire de Zildjian à Boston. Personne n’aurait alors osé imaginer qu’il s’agissait de l’une des dernières apparitions de Spears sur scène. Encore moins Chambers, dont la route avait failli se stopper nette dix ans auparavant. L’occasion de se rappeler qu’il nous faut savourer chaque moment que ces légendes parviennent encore à nous offrir. Nous ne sommes pas éternels. Heureusement, l’art défie le temps qui passe.
Sébastien Benoits
Numéro 210
7,90€