Edito
L’accès de plus en plus démocratique à l’outil technologique aura-t-il comme conséquence une sorte d’uberiseration du métier de batteur ? On peut sincèrement se poser cette question, à l’heure où sur une majorité de productions (nous ne parlons pas des maquettes, mais de véritables produits finis) arrivant jusqu’à nos oreilles, les batteries que l’on entend sont virtuelles et émanent de logiciels informatiques de plus en plus bluffants, qui ne sont plus les jouets inoffensifs (au demeurant parfois créatifs) que certains ont connu dans les années 80. Désormais, chaque impulsion, fill et break est découpé, quantisé, « sound replacé », et la pseudo touche organique qui donne l’illusion (mais l’illusion seulement) à l’auditeur que la musique est vivante est insufflé à grand renfort de « human feel », un peu comme si la voix de votre GPS de votre voiture, aussi réaliste et suave soit-elle, se mettait à « parler batterie ». L’appât du gain et la fainéantise ont de l’avenir, et à l’heure où, partout dans le monde, les plus beaux sanctuaires de l’enregistrement ferment leurs portent les uns après les autres, nous devons militer pour préserver le vrai groove, flamme de notre passion, mais aussi le vrai son, forgé par des musiciens qui savent ce qu’ils font et des ingénieurs du son compétents. Cet art du studio, qui a permis à bon nombre de nos héros de s’exprimer avec tout leur talent, de Steve Gadd à Vinnie Colaiuta, en passant par Jim Keltner et Russ Kunkel. Aujourd’hui encore, ce métier résiste, et même si l’univers des séances se réduit comme peau de chagrin, de vaillants mercenaires continuent de nous faire rêver et seront peut-être les idoles de demain. Parmi eux, il y a Josh Freese, le « first call player » californien, et Ash Soan, son alter ego anglais. Ils sont tous les deux dans ce numéro pour partager avec vous un peu de leur passion et de leur expérience, alors bonne lecture, et à la prochaine !
Numéro 145
5,90€